il fait gris dans ta tête, tout à coup (2018)

il fait gris dans ta tête, tout à coup, vidéo-poème de Sarah Seené et Guillaume Vallée

Super-8 - 3 min 07 - 2018

* Grand Prix des Rendez-vous vidéo-poésie 2018 (RVVP) - Festival de Poésie de Montréal 



il fait gris dans ta tête, tout à coup est le résultat d’une collaboration entre deux artistes relatant un événement traumatique qui leur est commun. L’origine de ce film est un poème qui ici, prend une forme visuelle. Le mélange de la Super-8, du Polaroid, de la peinture sur pellicule et de la narration donne naissance à un dialogue artistique fort de sens, et à une œuvre autobiographique sensorielle, intime et fragile.

 

Il évoque la zone grise d'une agression et les tentatives de reconstruction, au coeur d'un récit visuel intime et sensible. 

 

La pellicule Super-8 montre dans un premier temps la révélation des clichés Polaroids (auto-portraits noirs et blancs) image par image, puis le récit bascule. La caméra capte alors la réalité du processus de création, la photographe photographiant, comme un miroir frontal, qui se colore au fur et à mesure du texte, de nuances chaudes et nébuleuses.

 

Le texte

 

Il fait gris dans ta tête, tout à coup

Il y a cette eau salée qui coule sur tes genoux

Une ombre s'est invitée dans le tableau

Elle est posée sur ton crâne, comme un étau.

 

Il fait nuit dans ta poitrine, à jamais

Y'a cette machine transparente comme un secret

Arborant des rouages, qui t'appartiennent pourtant

Elle agite des images qui te rongent en dedans.

 

Il fait froid dans ta chaleur comme un refrain

Y a cette fatalité que tu souhaiterais partie demain

Celle qui t'entoure de ses bras bien trop piquants

Tu voudrais t'en dégager, t'enfuir. Comme un enfant.

 

Il fait noir dans tes orteils recroquevillés

Perdus, sous les draps que tu tentes de laver

Pour les faire ressembler à ceux d'avant

Sans arrêt, comme un éternel recommencement.

 

Il fait pas beau au fond d'ta gorge, toute la journée

Y a des nuages juste au milieu, pour tout gâcher

Des sanglots, noués dans les cordes vocales

Des frissons qui courent sur la colonne vertébrale.

 

Il fait sombre dans tes souvenirs anesthésiés

Y a de la boue sur ces flash back deshinibés

Qui colle à tes paupières cousues de fil d'or

Et à ton coeur serré, qui tente de battre encore.

 

Il fait moche dans ta confiance en l'humanité

Il y a des roches qui tombent du ciel sur ta beauté

Des résidus qui sont enfouis dans l'estomac

et qui pourrissent effrontément, à l'intérieur de toi.

 

Il fait trop mal ce sentiment d'être envahie

Par des fantômes de chair dont tu n'as pas envie

Qui persistent sous la ceinture du consentement

Et te ramènent sans cesse à ce qui coule comme du sang,

 

Il fait trop chaud dans ta colère qui explosera

Comme une marmite débordante de mort aux rats

Un tourbillon, une tempête, un ouragan

Feront justice, juste avant

 

D'arrêter le temps.

 

(Texte © Sarah Seené - 2018 - Tous droits réservés)